Page:Mommsen - Histoire romaine - Tome 4.djvu/274

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et le théâtre, avaient commencé son éducation, en le préparant à comprendre les grandes œuvres poétiques de la Grèce. Mais l'enseignement direct et profond est venu de l’apport dans Rome de la langue et du vers helléniques: les meilleurs critiques anciens s’empressent d’en faire l’aveu.

Lorsque « la Grèce vaincue eut subjugué son farouche vainqueur, et importe l’art dans l’agreste Latium l, » elle triompha surtout en mettant a la place d’un idiome · indiscipline une langue admirablement noble et assouplie; en faisant succéder d’autres mètres au mètre monotone et haché du vers saturnien; Alors, le trimètre facile, l’hexamètre superbe, le tétramètre puissant, l'anapeste joyeux, tous les rhythmes lyriques artistement entrelacés et adaptés à la langue nationale vinrent frapper à plein son les oreilles latines. La langue du vers est la clef du monde idéal de la poésie : la mesure est la clef de la sensation poétique. Que si l’épithète est muette pour vous`, si la métaphore vivante est lettre morte, si. les dactylcs et les iambes et leur mouvement cadeneé ne vous font pas tressaillir, ce n’est pas pour vous qu’Homere et Sophocle ont chanté. Mais on dira peut-être que le sentiment de la poesie et du rhythme procède de lui-meme, Oui, la nature a mis le sens de l’idéal au fond de nos poitrines : mais pour fleurir, il lui faut le rayon d’un soleil favorable. Or, chez les Latins partieulièrement, chez ce peuple peu ouvert à la poésie, il a fallu la culture d’une·main étrangère. Qu’on ne dise pas non plus que la langue des Grecs, que leur littérature, déjà vulgarisées, auraient dù suffire à ce public romain, s’il avait pu sentir! Comme si le charme mystérieux de la langue, comme si ce

  • [Grœcia capta ferum victorem cepit, et artes

Intulit agrestii Latio....

(Horat., Epist. 2,.1, 156.)} V