Page:Mommsen - Histoire romaine - Tome 6.djvu/40

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Baia, et de toute la cote du golfe de Naples, l’Eldorado des élégants oisifs. Les jeux de hasard faisaient fureur, et non plus, comme on pense, avec quelques noix pour mise, ainsi qu’au bon temps des osselets italiques! En 639, un édit censoral avait gourmandé les joueurs. Les femmes et même les hommes commençaient à dédaigner Les vêtements- l’ancien vetement de laine : on voulait des gazes légères, accusant les formes plus qu’elles ne les cachent, et des étoffes de soie. En vain les lois somptuaires défendaient les dépenses folles en parfumeries venues de l’étranger! Mais c’était à table que la vie des riches s’étalait dans tout son éclat. Un bon cuisinier se payait un prix extravagant, jusqu’à l00,000 sesterces (7,600 thal. (= 28,500 fr.]) : quand on bâtissait, la cuisine était la grande affaire: les villas, non loin de la cote, avaient leurs réservoirs d’eau salée, livrant tout frais les poissons de mer et les huîtres. Pauvre diner que celui où l'on servait aux convives les mets entiers, et non pas seulement les morceaux choisis ; que celui où on les forçait à manger d’un plat, au lieu de ne faire que le déguster : on commandait au loin, Dieu sait à quel prix! les comestibles délicats, et les vins grecs, qui dans tout repas honnete circulaient pour le moins une fois 1. Autour de la table, s’agitait la troupe

1 [M. Mommsen s’inspire ici des paroles d’un orateur contemporain, Marcus Favorinus, celui dont Aulu-Celle (XV, 9) nous a conservé le fragment tiré d`une harangue prononcée pour appuyer la loi 97. Licinia, de sumplu mixiuendo (vers 657) : « Prcefecli popinœ alque luccuriœ negunt cœnam lantam esse, msi, cum lubentissime edis, mm _ auferalur, et alia esca atque amplior succenturietur. Is nunc [los cœnœ lmbelur inter istos, quibus sumlus et fastidium pro faeetiis procedil : qui negant ullam avem prœler hcednlam lolam comesse oporlere, celerarum avium atque allilium, nisi lanlum apponatur, ut aeluniculis inferiari parte saluri hanl, cozwivium pulant inopiu sordere; superiorem parlem avium atque altilium qui edant, eos palamm nan habere. Si proporlione luœuria pergil crescere, quid relinquilur. nisi uti delibnri sibi cœnas jubeanl, ne edendo defeligen.- tur, quamlo stralus auro,’ argenlo, pnrpuro, amplior aliquol liomini· bus quam diis immorlalibus adornalur? » Nous avons jugé utile d’insérer tout ce passage curieux : on voit par là comment l’historien allemand sait emprunter pour ses tableaux tous les traits, toutes les couleurs qu‘il retrouve dans les décombres de I`ancienne littérature