Page:Monneron - Poésies, 1852.djvu/21

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Peut-être aurai-je vu, sur mon humble Jura,
L’étoile qui m’aimait, le ciel qui m’inspira…
Et cette lyre d’or et ces cordes de flamme
Que faisaient soupirer les ailes de mon ame,
Avant le jour où Dieu, de ses doigts tout-puissants,
L’enfermait dans la poudre et l’enchaînait aux sens. »

Ce dernier fragment a l’avantage de montrer en quelque sorte réunies la description et la pensée, et surtout de laisser entrevoir un côté faible et maladif, qui perce volontiers et qui finirait par lasser. Il semble parfois, qu’à force de s’élever vers l’azur, la pensée de Monneron devienne flasque et vaporeuse, comme l’atmosphère qui l’entoure. Elle n’a plus de corps, ce n’est qu’une ombre subtile, dont le regard ne distingue pas sans peine les contours. Cette faiblesse, on le conçoit aisément, se retrouve dans le style. Pour vivre et prospérer, la plante a besoin d’enfoncer ses racines dans la terre ; si vous ne la nourrissez que de l’air du ciel, elle ne tardera pas à dépérir. Il en est de même de la poésie.

Toutefois, chez Monneron l’élan lyrique est souvent admirable. La pensée se moule dans la strophe et coule avec plénitude, comme un fleuve puissant, majestueux et profond, qui, sans déborder, ne laisse à découvert aucune partie de son lit. La pensée et la forme se fondent dans une harmonie parfaite ; il y a force et mesure, souplesse et grandeur. Qu’on lise dans