Page:Monneron - Poésies, 1852.djvu/64

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— Poète, croyons-nous à l’amour sur la terre,
Nous qui pour nos chansons réclamons le mystère,
Nous qu’épouvante le grand jour ?

Non, non, ce n’est qu’au ciel que veut être entendue
L’idéale musique en nos cœurs répandue !
Silence !… est le mot d’ici-bas !
Ah ! ce pauvre exilé qui passe sur la route,
Pourquoi, quand vous chantez, voulez-vous qu’il écoute ?
Du ciel il ne se souvient pas !…

Pourtant il en est un qu’émeut ta poésie,
Seule fleur que son ame au passage a saisie,
Pour être moins lasse en chemin.
À vos accents mon ame errante, soucieuse,
Revêt cette jeunesse aimante, harmonieuse,
Qui n’aura point de lendemain.

Poète !… tu vois donc, puisque j’aime à t’entendre,
Qu’il faudra bien m’aimer un jour ;
Car deux ames jamais ne pourront se comprendre
Qu’au rendez-vous du Dieu d’amour.


Mai, 1835.