Page:Monod - Renan, Taine, Michelet, 1894.djvu/206

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

violente qui animait contre le moyen âge les hommes du XVIe siècle ; il voulut rétracter, effacer les pages émues et sympathiques qui resteront malgré lui son plus beau titre de gloire. L’esprit de chacune des époques dont il s’occupait revivait en lui avec un élan de passion irrésistible ; c’est ce qui fait sa grandeur comme artiste, la puissance de vie qui anime son histoire ; c’est ce qui fait aussi sa partialité, le caractère incomplet, exagéré, inégal de ses dernières productions historiques. On l’admire, on l’écoute, tantôt avec une émotion bienveillante, tantôt avec une curiosité avide et parfois indiscrète ; mais on ne peut pas lui abandonner la direction de son jugement et de son intelligence.

Ce que j’ai dit des œuvres historiques de Michelet, je pourrais le dire aussi de ses petits livres, où se mêlent, d’une façon charmante et bizarre, la science, la philosophie, la psychologie et la poésie, qui entraînent et ravissent l’imagination et le cœur sans convaincre ni satisfaire la raison. Nul ne les a lus sans être ému, et pourtant les idées qui s’y trouvent exprimées n’ont point fait de prosélytes. C’est que ces idées n’ont point un caractère bien déterminé ; elles flottent entre la science, la religion