Page:Monod - Renan, Taine, Michelet, 1894.djvu/268

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du roi Robert et de saint Louis, des pages d’une beauté incomparable, mais il éprouvait pour l’Église des sentiments d’une affection toute filiale : il n’osait toucher « aux plaies d’une Église où il était né et qui lui était encore chère… Toucher au christianisme ! ceux-là seuls n’hésiteraient point qui ne le connaissent pas. Pour moi, je me rappelle les nuits où je veillais une mère malade ; elle souffrait d’être immobile, elle demandait qu’on l’aidât à changer de place et voulait se retourner. Les mains filiales hésitaient ; comment remuer ses membres endoloris[1] ? » Il se laissait même aller en contemplant les grandeurs du passé à de poétiques regrets. Après avoir cité les paroles de saint Louis à son fils, il ajoute : « Cette pureté, cette douceur d’âme, cette élévation merveilleuse où le moyen âge porta ses héros, qui nous la rendra ? » Mais à mesure qu’il avançait dans l’histoire, il voyait l’Église se dégrader, se corrompre, et, après avoir été la gardienne et l’apôtre de la civilisation, se faire l’ennemie de tout progrès et de toute liberté. Son cœur embrassa la cause des persécutés, des victimes de l’Église, avec la même sympathie

  1. Mémoires de Luther, préface.