Aller au contenu

Page:Monod - Renan, Taine, Michelet, 1894.djvu/37

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

toutes les idées sur la vie et sur le monde qu’il répandra en détail dans tous ses écrits ; mais elles sont affirmées ici avec un ton de conviction enthousiaste et de certitude qu’il atténuera de plus en plus dans ses écrits ultérieurs, sans rien abandonner d’ailleurs du fond même de sa doctrine. Il salue l’aurore d’une ère nouvelle, où la conception scientifique de l’univers succèdera aux conceptions métaphysiques et théologiques. Les sciences de la nature surtout et les sciences historiques et philologiques sont non seulement les libératrices de l’esprit, mais encore les maîtresses de la vie. Pédagogie, politique, morale, tout sera régénéré par la science. Par elle seule, la justice sera fondée parmi les hommes, et elle deviendra pour eux une source et une forme de religion[1].

Sur les conseils d’Augustin Thierry et de

  1. La politique n’a joué qu’un rôle très secondaire dans la vie d’Ernest Renan, aussi n’ai-je pas cru devoir insister sur les sentiments qu’ont pu lui inspirer les révolutions de 1848 et 1850. Mais il n’est pas inutile de rappeler qu’en 1850 il se disait de tendances, mais non de doctrines socialistes, et que le 2 décembre fut pour lui comme pour tous les hommes de cœur de sa génération une cruelle épreuve. Il écrivait le 14 janvier 1852 :
    « J’aurais, je crois (après le 2 décembre), définitivement et à tout jamais, répudié le suffrage universel, qui nous a joué cet effroyable tour. « On ne peut vivre avec toi, ni sans toi. » Voilà bien le mot, et c’est toute la vie et toute l’histoire… Croiriez-vous que dans la fièvre des premiers jours, j’étais presque