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Page:Monselet - Curiosités littéraires et bibliographiques, 1890.djvu/223

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ET BIBLIOGRAPHIQUES

Il gagnait péniblement sa vie, ainsi que le prouve une lettre adressée à Voltaire en un jour de désespoir. Dans cette lettre, dont chaque ligne est une plainte, il se propose au grand polygraphe pour écrire une brochure apologétique. Mais ce n’est là que le prétexte. Le véritable objet est un emprunt de cinquante louis qu’il sollicite de Voltaire.

Voici le tableau cruel que l’abbé Prévost trace de sa situation.

Le dérangement de mes affaires est tel que, si le Ciel ou quelqu’un inspiré de lui n’y met ordre, je suis à la veille de repasser en Angleterre. Je ne m’en plaindrais pas si c’était ma faute ; mais depuis cinq ans que je suis en France, avec la protection d’un prince du sang qui me loge dans son hôtel, je suis encore sans un bénéfice de cinq sous. Je dois environ cinquante louis, pour lesquels mes créanciers réunis m’ont fait assigner, etc. ; et le cas est si pressant qu’étant convenu avec eux d’un terme qui expire le premier du mois prochain, je suis menacé d’un décret de prise de corps si je ne les satisfais dans ce temps. De mille personnes opulentes avec lesquelles ma vie se passe, je veux mourir si j’en connais une à qui j’aie la hardiesse de demander cette somme, et de qui je me croie sûr de l’obtenir.