Page:Monselet - Curiosités littéraires et bibliographiques, 1890.djvu/39

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
33
ET BIBLIOGRAPHIQUES

— Tenez, voici le Courrier des spectacles ; lisez, et jugez si je vous en impose. Je viens de faire retenir une loge, et je ne vous quitte pas que vous ne m’ayez promis de m’accompagner. Vous ne verrez pas tous les jours réunis Fénelon, représenté par Ribié, et Madame Angot, jouée par Corsse. »

Je n’eus plus rien à opposer à monsieur votre oncle, et je lui promis tout ce qu’il voulut. Nous dînâmes ensemble, et, l’heure du spectacle arrivée, nous montâmes en voiture et nous arrivâmes par la rue de Bondy. Bien nous en prit de n’avoir pas tardé davantage, car la foule était extrême, et l’on se disputait notre loge, quoiqu’elle fût fermée ; mais notre présence fît cesser toute contestation, et nous nous emparâmes de notre propriété, non sans exciter l’envie de bien des gens, qui ne voyaient notre bonheur qu’avec beaucoup de jalousie…

Nous arrivâmes au moment tant désiré de voir jouer Madame Angot. On ne saurait se figurer les trépignements de pieds, les battements de mains, les bravos, qui se firent entendre lorsque le coup de sifflet du machiniste annonça le lever du rideau : c’était un enthousiasme général !

Cette farce est environ à sa cent cinquantième représentation, et elle a rapporté à elle seule plus que tous les chefs-d’œuvre de Corneille, de Racine et de Voltaire n’ont jamais rendu. Mais, pour moi, j’avoue que, si je n’avais pas été en la compagnie de monsieur votre oncle, il m’aurait été impossible de rester jusqu’à la fin du spectacle. Il s’acheva cepen-