Aller au contenu

Page:Monselet - Fréron, 1864.djvu/13

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bonne odeur des boiseries et des reliures, à peine hantées par quatre ou cinq lecteurs silencieux. Chaque matin, je m’installais dans celle-ci, par un clair soleil, seul à une table longue, à côté d’une écritoire en liège, ayant devant moi plusieurs tomes de mon auteur. D’abord un peu distrait, je m’enfonçais insensiblement dans les cercles de son enfer, m’arrêtant devant chaque damné, touchant du doigt et réveillant des rancunes seulement assoupies. Je n’avais eu jusqu’alors qu’une pitié instinctive, presque secrète, pour Fréron, pour ce vaincu du dix-huitième siècle. En feuilletant son immense répertoire, j’arrivai peu à peu à la sympathie. Qu’on ne s’étonne donc pas si ces pages, commencées en Bretagne et finies à Paris, ont parfois les allures d’un plaidoyer. Jamais homme n’eut tant besoin d’être défendu, jamais écrivain ne mérita mieux de l’être.