Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/102

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pas été gracié d’une obstination bien compréhensible d’ailleurs, et d’un subterfuge bien innocent.

— Ceci vous regarde, dit la marquise.

— Comment ?

— Madame la marquise a raison, dit Irénée ; vous voici dans la place, le plus fort est fait ; vous y êtes entré par surprise, mais, enfin, à la guerre comme à la guerre ! C’est à vous maintenant de faire oublier votre triomphe.

— Et nous vous prévenons que nous nous en souviendrons longtemps, ajouta la marquise de Pressigny.

M. Blanchard ne la quittait pas des yeux. Ce fut auprès d’elle qu’il s’assit. Amélie occupait le côté opposé, auprès de sa mère. Elle n’était attentive qu’au concert, un des premiers auxquels elle assistait. Depuis quelques instants surtout, son regard était fixé sur l’estrade des musiciens, où une femme venait de monter, cérémonieusement conduite par le maire lui-même. Amélie saisit le bras de la comtesse d’Ingrande.

— Ah ! maman, s’écria-t-elle, regardez donc ; c’est cette dame de ce matin !

La comtesse regarda : c’était bien Marianna, en effet. Prévenu de son arrivée, le maire de la Teste avait été la prier, dans la journée, de prêter son concours illustre à la fête et de chanter pour les pauvres. Marianna, en proie à mille inquiétudes et encore souffrante de l’accident de la veille, avait refusé. Mais, le soir venu, rassurée et rendue sur sa résolution, et céda aux sollicitations nouvelles qui lui furent adressées.

Un murmure d’aise et de curiosité agita la salle. Le nom et le talent de la Marianna n’étaient un mystère pour personne ; c’était une bonne fortune pour ce hameau. Dès qu’elle parut sur l’estrade, les premiers applaudissements furent pour sa beauté. Certaine qu’elle était de l’existence de Philippe Beyle, elle rayonnait pour ainsi dire : ses yeux embrassaient tout, sa bouche souriait avec un air de victoire mêlé de bonté ; une respiration ample et régulière soulevait