Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/38

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— Je n’en pourrais disconvenir sans injustice, répondit la marquise.

— Auriez-vous des renseignements fâcheux sur sa moralité ? Ma sœur, vous avez tenté maintes fois de m’enseigner l’indulgence pour certaines folies inhérentes à la jeunesse et au rang ; êtes-vous devenue plus sévère que moi sur ce chapitre ?

— Ce n’est pas de cela qu’il s’agit ; comme vous, je tine Irénée pour un brave et charmant garçon.

— Sa fortune serait-elle gravement compromise par des prodigalités ? continua la comtesse.

— Je n’ai pas lieu de le supposer.

— Eh bien, alors ?…

— Eh bien, alors, dit la marquise, je vais parler. Il ne m’a pas été difficile, vous le pensez bien, de pénétrer les projets que vous avez sur M. de Trémeleu. Dans deux ans d’ici, Amélie ne sera plus une enfant ; et quoique son cœur n’ait pas encore parlé, vos désirs ont déjà préparé pour elle un mariage où toutes les convenances se trouvent réunies.

— Ah ! vous l’avouez ! dit Mme d’Ingrande.

— De grand cœur ; et moi-même, ce serait avec une satisfaction égale à la vôtre que je verrais Irénée devenir l’époux d’Amélie ; mais je crains que cet hymen soit impossible.

— Impossible ! Et pourquoi ?

— Parce qu’Irénée n’aime pas Amélie.

— Qu’en savez-vous ?

— Je m’en suis aperçue à mille riens, à mille nuances sur lesquelles il est bien difficile de me tromper, moi.

— Songez à l’âge de ma fille dit la comtesse, et ne vous étonnez point si les regards d’Irénée ne se sont encore portés sur elle qu’avec indifférence. Elle est si jeune !

— Soit, répliqua la marquise ; mais si le cœur de M. de Trémeleu était occupé ailleurs ?

— Occupé…

— Ou plutôt absorbé. Qu’en diriez-vous ?

— Ce n’est que dans deux ans que je veux marier ma fille.