Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/88

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au bas de l’estrade, sur la grève, attendant le spectacle où la plupart d’entre eux allaient être acteurs, et regardant le bassin sillonné par les yoles, les tilloles, les péniches et les boths qui devaient concourir. Ce tableau réunissait le pittoresque et la grandeur. Dans ces types noircis par le vent et la mer, courbés par les tempêtes — plus furieuses sur les côtes de Gascogne que partout ailleurs — il ne fallait pas trop chercher la beauté ; mais on y trouvait à amples doses l’énergie, la vigueur, l’adresse. La double habitude du travail et du péril, dans un des endroits les plus arides de la terre, avait fini par rendre leurs traits rebelles à la gaieté. La Teste-de-Buch ne contenait peut-être pas trois cabarets à cette époque. Il y a des peuplades qui ne rient jamais.

De même, on eût vainement tâché de surprendre un air de jeunesse sur la physionomie des femmes ; mariées presque toutes à des marins, elles portaient uniformément le costume noir, comme si elles ne vivaient que dans la perspective et l’inquiétude constantes du veuvage. Marinières elles-mêmes, elles avaient les jambes nues jusqu’au-dessus du genou ; leur tête était enveloppé d’un mouchoir en marmotte et surmontée d’un chapeau de paille, posé en éteignoir, avec d’épais rubans de velours.

Les régates devaient être précédées d’une course aux échasses, divertissement tout local et qui vaut la peine d’être décrit. Nous laisserons donc Marianna rentrer seule et farouche à l’Hôtel du Globe, et nous demanderons à nos lecteurs la permission de les faire assister à la course aux échasses, sur la plage d’Eyrac. Qui sait si nous n’y rencontrerons pas quelques-uns des autres acteurs de cette histoire ?

Il y avait, comme on dit en langue hippique, six hommes et quatre femmes d’ engagés pour cette course originale. À la Teste, les femmes partagent tous les exercices des hommes. Ils étaient donc dix, dix tchankas, pour nous servir du patois landais, qu’on serait tenté de confondre avec les idiomes japonais ou chinois. Les tchankas sont les personnes montées sur des échasses ; se tchanker signifie : monter sur des échasses.