III
JE ME FAIS CHEF DE CABALE
Je m’étais logé aux environs de la Comédie française : ce voisinage me donna le goût du théâtre, et je devins en peu de temps un des habitués du parterre.
J’y apportai, comme partout, mon esprit de querelle et d’opposition. Entre tous les juges qui décidaient du sort des pièces, du destin des acteurs, je me fis remarquer par mon despotisme. On commença par me craindre, on finit par me rechercher : les comédiennes tentèrent de m’attirer dans leurs lacs, les comédiens m’envoyèrent des présents ; j’eus mes sympathies et mes antipathies ; — et, comme j’avais le verbe haut, l’œil impératif, le geste facile, et toujours cette grande diablesse crêpée dont se choquait tant Rameau le neveu, il m’arrivait très-souvent de rallier à mon opinion, quelle qu’elle fût, la masse entière du public. Je compris quel parti je pouvais tirer de cette influence, et je ne m’occupai plus qu’à l’augmen