Aller au contenu

Page:Monselet - Les Oubliés et les Dédaignés, 1876.djvu/185

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
171
LE COUSIN JACQUES.

jarretière coquelicot, demain c’est un Madrigal à la jeune marquise de Nédonchel qui prenait les boues de Saiut-Amand ; ou bien encore un Impromptu fait sur le palier d’Eugénie, qui m’avait crié bonsoir par la serrure. L’idylle et la romance ne veulent pas céder d’un pouce à la politique. Vainement prend-on la Bastille et égorge-t-on les financiers, Iris se moque de la Bastille et continue de mener paître ses agneaux dans les prés du Cousin Jacques. Pas un gentilhomme de campagne, pas un gai chanoine, pas un militaire amoureux, pas un désœuvré bel-esprit et bon convive qui ne lui envoie sa protestation rimée. Chacun s’efforce de retenir par un pan de leur tunique les Muses attristées ; chacun voudrait étouffer, par un refrain pimpant et insouciant en apparence, le bruit que fait la Révolution.

Il faut céder cependant, il faut céder, poétiques abonnés des Lunes ! Déjà le Cousin Jacques ne peut plus subvenir aux frais de son journal ; il se voit écrasé par la concurrence formidable qui grandit autour de lui. Les Actes des Apôtres, l’Ami du peuple, la Chronique de Paris absorbent l’attention générale. Bientôt il est entièrement éclipsé par Carra, Gorsas, Loustalot et autres nouveaux venus que le Parnasse n’attendait pas.

Les Lunes cessèrent de paraître.

Forcé d’accommoder son esprit à la mode du temps et de le tremper aux sources équivoques de l’allusion, le Cousin Jacques improvisa une sorte de divertissement intitulé : la Fédération du Parnasse, lequel fut représenté trente et une fois en un seul mois, sur le théâtre des Beaujolais. Un succès si prononcé l’encouragea : plusieurs théâtres sollicitaient sa verve de