jesté portugaise. Quoi qu’il en soit de ces assertions, et de leur plus ou moins de fondement, il n’eût pas été sans danger de les soulever devant moi, car mon épée est souvent sortie du fourreau pour des motifs moins sérieux.
Mon épée, entendez-vous, monsieur ? non pas l’épée d’un simple gentilhomme, mais l’épée d’un soldat. À peine émancipé, on fit de moi un mousquetaire ; et pour l’instant, c’était ce que l’on pouvait faire de mieux, tant j’avais un caractère intraitable. Il n’était bruit chaque jour dans Grenoble que de mes querelles, tantôt avec la garnison, tantôt avec les bourgeois. Enfin, après avoir été pendant quelque temps la terreur des cafés, je trouvai que ma ville natale n’était pas un théâtre assez large pour mes prouesses, et je vins à Paris, la ville par excellence, celle que j’avais toujours rêvée, le seul endroit du monde où tout se peut, où tout arrive et où rien n’étonne.
Une fois que je connus Paris, je jurai de n’en jamais sortir ; et de fait, je ne l’ai quitté que pour entreprendre de petits voyages aux alentours, sans dépasser la Normandie.
J’eus vingt ans sous la régence. Notez ces deux dates-là ; elles expliquent bien des choses de ma vie ; elles en excusent quelques-unes peut-être. On n’avait pas impunément vingt ans sous le règne des Parabère et des Phalaris ; — et s’il a été donné à Voltaire de traverser d’un pied léger ce temps de délires sans y égratigner son cœur, c’est que Voltaire portait la meilleure des cuirasses : l’ambition. Moi, je n’ai été ambitieux que sur le tard. Auparavant, j’ai voulu être amoureux.