pipeaux et se mit à raconter, en rimes quelquefois normandes, les espiègleries de Vénus et de sa cour. Lorsqu’il en eut amassé de quoi faire un volume, Plancher-Valcour marcha à grandes enjambées sur Paris.
Rien ne réussit comme la jeunesse, comme le bon air, comme la confiance, un peu hardie, un peu insolente même ! Du premier coup, il trouva un éditeur qui lui imprima tout de suite ses vers, avec joli frontispice gravé, et qui lui donna même un peu d’argent. C’était miraculeux ! — Plancher-Valcour, se trouvant bien à Paris, y resta, laissant de côté l’art dramatique, qui, après tout, pouvait bien attendre. Il loua une chambre au sixième ou au septième étage, et là-dedans il rima du matin au soir, comme un enragé. Son premier recueil, un peu déshabillé, avait fait quelque bruit ; il l’avait intitulé : Le Petit-Neveu de Boccace ou Contes et Nouvelles en vers. Ce sont des badinages couleur de rose, qui ne peuvent être lus que dans une société légère, après un dîner aux bougies, et lorsque les valets sont congédiés. Voici le ton du prologue :
J’ose évoquer ton ombre dans ce jour,
La Fontaine ! ô mon maître ! ô mon guide !
Ma Muse encore et novice et timide
Va crayonner les ruses de l’Amour.
Prête à mes chants cette grâce ingénue,
Ce voile transparent qui ne fait qu’agacer,
Et qu’avec art tu sus placer
Sur la volupté demi-nue.
Plancher-Valcour demeurait dans la même maison que le traducteur de La Place, lequel avait alors plus de soixante-dix ans et ne semblait pas s’en douter.