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LES RESSUSCITÉS

contre en route une bonne fortune de style, il la saisit par la fenêtre du wagon, mais il ne la guettera point ; ou si, dans l’intervalle d’une station, il s’arrête à piper des mots en l’air, ce sera alors quelque grosse excentricité, comme « une voix éperonnée de sourires moqueurs ; » mais ces curiosités sont rares chez lui, et il faut vraiment qu’il n’ait rien de mieux à faire pour s’amuser à guillocher des phrases.

Au théâtre, son succès est peut-être moins net, moins franc, moins décidé. Longtemps il a cherché sa route à travers la tragédie, la comédie et le drame ; souvent on dirait qu’il se sent à l’étroit sur les planches : il est saccadé, contraint : il ose trop et n’ose pas assez. Le Proscrit et Gaétan, quoique renfermant des scènes d’une beauté réelle, sont peut-être indignes de l’homme qui a écrit Clotilde. Dans ses derniers temps il avait installé son drame en plein boulevard. Son drame s’appela dès lors l’Ouvrier, les Étudiants, la Closerie, et devint le drame du peuple. Il dit adieu aux grandes dames de la comédie, comme il avait déjà dit adieu aux grandes dames du roman ; il prit ses héros et ses héroïnes dans la rue, dans la