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petits mémoires littéraires

Le soir de ce même jour, on le retrouve encore à la sortie de l’Odéon, en compagnie de Privat d’Anglemont et d’une autre personne. On entre un moment au Café belge, puis chez le boulanger Cretaine, rue Dauphine, où chacun mange deux petits pains. Gérard de Nerval a de l’argent, il paye la consommation. Privat propose d’aller au restaurant Baratte, à la Halle, Gérard refuse et s’éloigne seul, selon sa coutume.

Ici commence le mystère ; ici se forme le drame.

 

Et, le surlendemain, Alexandre Dumas écrivait dans son journal le Mousquetaire :

« C’est là que, vendredi matin, à sept heures trois minutes, on a trouvé le corps de Gérard encore chaud et ayant son chapeau sur la tête.

» L’agonie a été douce, puisque le chapeau n’est pas tombé.

» À moins toutefois que ce que nous croyons un acte de folie ne soit un crime, que ce prétendu suicide ne soit un véritable assassinat.

» Ce lacet blanc qui semble arraché à un tablier de femme est étrange.

» Ce chapeau que les tressaillements de l’agonie ne font pas tomber de la tête de l’agonisant est plus étrange encore.

» Le commissaire, M. Blanchet, est un homme d’une grande intelligence, et nous sommes sûr que d’ici à quelques jours il pourra répondre à notre question. »

Vous le voyez, le soupçon naît et se forme dès le premier jour. Dès le premier jour, le mot de justice est prononcé.

Mais, hélas ! M. Blanchet n’aboutit pas, ne répond à rien et à personne, pas même à Alexandre Dumas, — et l’enquête s’en va a l’eau.