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petits mémoires littéraires

libretto, s’il vous plaît ? Ce n’est pas pour Béranger, je pense ?

— Ni pour moi, dit naïvement le curé.

— Je le comprends.

— C’est pour mon organiste que voici… Ah ! monsieur Dumas, si vous saviez quel beau talent a ce garçon ! Que ne pouvez-vous venir l’entendre un de ces dimanches ?

— J’irai dimanche prochain, dit Dumas.

— Pourquoi faul-il que la musique sacrée ne lui suffise pas ? Les hommes ne sont jamais contents de leur sort. Bazille mourra s’il n’a pas un livret d’opéra.

— D’opéra comique, murmura M. Bazille.

— J’entends bien, dit Dumas ; mais c’est que ce n’est pas précisément mon genre… Je n’ai fait qu’un seul livret d’opéra comique, et encore ne suis-je pas bien sûr qu’il soit de moi.

Il voulait parler de Piquillo, musique de Monpou.

— Vous voulez rire, reprit le curé de Sainte-Élisabeth ; tous les genres vous sont familiers.

— Croyez-vous ?

— C’est du moins ce que Béranger prétendait l’autre jour.

— Monsieur le curé, vous êtes un homme d’esprit, dit Alexandre Dumas.

Et se tournant vers M. Bazille :

— Jeune homme, touchez là, je vous promets votre livret.

Dumas promit tout ce qu’on voulut ce jour-là.

Il promettait encore au bas de l’escalier, en reconduisant ses visiteurs.

Le bon curé ne se possédait pas de joie.

Je tiens cette histoire de M. Bazille lui-même, — qui,