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COMTE DE MONTAIGU ET J.-J. ROUSSEAU

ques semaines et le voyant irréprochable, lui confia, en janvier 1745, la direction de sa maison, ce qui permit à Henry d’exercer son ancien métier. Les lois de la République défendaient aux ministres étrangers de traiter directement avec les négociants pour leurs achats quotidiens : un prête-nom était donc indispensable. Henry s’aboucha avec un individu de son espèce, le marchand Cornet, Français naturalisé Vénitien, qui promit de fournir à l’ambassadeur tout ce qui lui manquerait pour la nourriture, l’entretien, etc. Le comte, pour le payer, lui remettait les lettres de change qu’il recevait de Paris[1]. Les deux complices avaient, par suite, intérêt à ce que l’ambassadeur dépensât plus que moins ; c’est ce qui amena Henry à grossir de moitié les mémoires dans lesquels le comte de Montaigu évaluait ses avances pour recevoir du ministère le remboursement de ses dépêches secrètes, et des ports de lettres[2] ; de plus, il se livrait à une contrebande effrénée. Son maître avait compté mensuellement avec lui pendant le premier trimestre de 1745 ; n’ayant rien remarqué d’anormal, il négligea cette précaution. Henry et Cornet abusèrent de sa confiance imprudente[3].

  1. Lettre de l’ambassadeur au marquis de Puyzieuls, 29 juillet 1747.
  2. Henry avouait lui-même dans une lettre à Cornet qu’un des articles de son compte, qui y estoit porté 4 559 liv. 54 d., ne s’élevait en réalité qu’à 2 000 livres.
  3. Cornet vola tant qu’il put l’ambassadeur avec l’aide de