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COMTE DE MONTAIGU ET J.-J. ROUSSEAU

cières pour l’année écoulée ; mais Henry ne se conforma que lentement à cette injonction. Son maître, qui commençait à le soupçonner, le somma de s’exécuter ; mais il dut patienter jusqu’au mois d’août. À ce moment, Henry produisit un compte obscur dont le total atteignait le chiffre de 176, 720 livres vénitiennes, c’est-à-dire 88, 000 livres tournois, ce qui supposait un train de maison s’élevant annuellement à plus de 50, 000 livres. L’ambassadeur, en examinant sommairement cette pièce, fut surpris de nombreux articles qui y figuraient, et exigea pour chacune des fournitures une quittance séparée, à défaut de laquelle tous les commerçants affirmeraient eux-mêmes le règlement de leur créance. Henry, se doutant que ses rapines seraient prochainement découvertes, se disposa à la fuite. Il brûla les papiers les plus compromettants, en enleva d’autres (entre autres des dépêches de l’ambassadeur, des années 1745 à 1746) et, abusant de la liberté qu’on lui laissait, il emporta avec lui tous les meubles de sa chambre[1]. Son complice Cornet protégea sa retraite en lui retenant une place dans une voiture qui faisait le service entre Venise et Florence et appartenait au grand-duc de Toscane. Avant de s’en aller, il avait eu l’impudence de dénoncer au ministre l’ambassadeur comme l’auteur

  1. Tous ces détails et les suivants sont tirés d’un document de la correspondance, intitulé « Mémoire instructif sur les affaires entre Son excellence M. le comte de Montaigu et MM. Henry et Cornet ».