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JOURNAL DU MARQUIS DE MONTCALM

coui, qui étoit que des sauvages affidés aux Anglois, pour les détourner, leur avoient appris que les Anglois en avoient tué un du Sault-Saint-Louis qui nous étoit affidé et fait prisonnier un Goyogouin, et que les Anglois assuroient qu’ils alloient faire un accord avec la France pour détruire et frapper sur tous les sauvages. Que cette nouvelle ne les avoit pas arrêtés et que le commandant de Cataracoui leur avoit donné des branches pour les rassurer. L’orateur a ajouté avec assez de fierté que peut-être dans le temps qu’ils étoient ici, leurs femmes et leurs enfants étoient exposés au ressentiment de l’Anglois ; que le colonel Johnson ne leur parloit plus avec des paroles douces, mais bien menaçantes, depuis qu’il voyoit leur peu de disposition à l’égard de l’Anglois ; mais qu’en tout cas ils sauroient se venger, se défendre, mourir, s’il falloit, et que la poussière qu’ils élèveroient en combattant en iroit jusqu’aux cieux. Ils ont parlé des soins qu’ils apportent pour contenir leurs jeunes gens ; ils se sont applaudis de la sagesse avec laquelle ils ont vécu jusqu’à présent ; ils ont prié leur père de ne leur donner le matin que du vin, afin de leur conserver la raison toute la journée, mais le soir de leur donner du lait de son teton gauche, parce qu’étant plus près de son cœur, il pourroit ne leur porter à la tête que des idées agréables avec lesquelles ils s’endormiroient paisiblement.

M. le marquis de Vaudreuil, après avoir reconnu le collier d’invitation pour être le sien et les avoir remerciés d’être venus, a répondu en commençant par leur faire présenter six branches de porcelaine, cérémonie accoutumée pour essuyer leurs larmes, leur déboucher le