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JOURNAL DU MARQUIS DE MONTCALM

un malheur involontaire qui ne retarderoit point le succès du siège. Dès le matin du 11, on prit une position pour faire camper les troupes. Le corps de M. de Rigaud se porta à un quart de lieue pour faire l’investissement du fort Ontario par des petits partis de Canadiens et de sauvages. Les trois bataillons françois furent campés, la droite appuyée au lac Ontario et couverte par cette même batterie que l’on avoit établie sur la grève ; la gauche à un marais impraticable. Toute la journée du 11 fut employée à faire faire un chemin à travers des bois en partie marécageux pour conduire l’artillerie ; il y eut quatre cents travailleurs des troupes de terre ou de celles de la colonie employés à cette opération, tout le reste le fut à faire un amas considérable de fascines, de gabions et de saucissons. On peut observer que pendant tout le temps qu’a duré le siège et le déblaiement, toutes les troupes ont pour ainsi dire été de service ou de travail.

Le 11, vers le midi, trois barques angloises sortirent de Chouaguen, venant pour nous reconnoître, et nous canonnèrent sans succès ; et notre batterie de pièces de canons les incommoda et les obligea de gagner au large et de rentrer en leur rade. Comme elles avoient de la peine à y rentrer, tous nos sauvages nous donnèrent un spectacle assez amusant ; ils fusilloient les barques, qui leur répondoient à coup de canon, et avec une agilité singulière, ils étoient rentrés à terre au moment que chaque décharge alloit partir.

Dans la nuit du 12, le régiment de Béarn arriva avec la grosse artillerie. Les barques des ennemis vinrent encore pour nous inquiéter ; mais nous avions augmenté