Page:Monteil - Histoire du célèbre Pépé, 1891.pdf/109

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
103
LA FÊTE DE MONTMARTRE

belle baraque qui, le soir, était éclairée à l’électricité. D’un côté, des musiciens hongrois soufflaient dans leurs instruments et tapaient la grosse-caisse ; de l’autre, les artistes faisaient la parade. Des femmes en maillot rose et en jupons courts dansaient, un châle jeté sur leurs épaules nues pour les préserver du froid. Elles avaient l’air de battre la semelle en se démenant gracieusement. L’une d’elles avait autour de sa taille un gros serpent qui inspira une grande terreur à Pépé.

Un homme habillé en hercule, avec une peau de lion jetée sur son maillot, enlevait à bout de bras des poids énormes.

— Ce n’est rien que ça, disait-il ; il faut voir dedans, quand je charge mon canon.

Et il montrait sur la toile une manière de portrait qui le représentait avec un canon de bronze sur ses épaules et un artilleur mettant le feu au canon qui partait en produisant une épaisse fumée.

— Venez voir l’homme-canon ! cria une voix.

Celui qui criait était le « queue-rouge », ainsi qu’on le nom­mait, l’antique queue-rouge coiffé d’un lampion, petit chapeau à trois cornes, vêtu d’une veste étroite des épaules, évasée par le bas, vert-clair, d’un gilet blanc à fleurs jaunes, d’une calotte à carreaux roses et noirs et de bas bleus. Il portait de larges souliers à boucles. Sa perruque était d’un beau rouge carotte et formait une queue au bout de laquelle le ruban qui la nouait prenait l’allure d’un papillon qui aurait continuellement battu des ailes. Ses joues maigres et son nez pointu étaient enluminés de vermillon.