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LE COMPÈRE DE MOUTONNET

avec des traits, des lignes, petit à petit donnait à ces lignes plus d’épaisseur et plus de forme.

— Viens donc, disait Gig. C’est affaiblissant le métier que tu fais là. Au lieu de te développer le torse, tu te plies l’estomac en deux. Ce n’est pas ainsi qu’on fabrique un homme.

Gig ne voulait pas que son travail fût perdu et que Pépé cessât d’être souple comme une anguille ; il n’entendait pas non plus que les qualités musculaires de l’enfant et son amour de la gymnastique se perdissent.

Il l’accrochait au trapèze après l’avoir travaillé sur la sciure de bois de l’arène, dans l’intervalle des représentations, et il lançait le trapèze, le balançait, lui donnait de la volée.

— Voyez-vous, patron, disait-il à Alcindor, ce qu’il faut faire de cet enfant, c’est un Léotard ; il est beau, il est musclé, il fera un Léotard magnifique.

— Ce serait une riche affaire, dit Alcindor, d’avoir un Léotard. Le public est friand de ce spectacle-là et Pépé nous attirerait du monde.

— Je vous dis que c’est ce qu’il faut en faire.

— Il est trop jeune ; ses bras sont faibles encore pour se retenir sur un trapèze en mouvement.

— Le temps de le dresser, il aura l’âge et les bras, dit Gig.

— Qu’est-ce que c’est qu’un Léotard ? demanda Pépé.

— Léotard ! Tu ne connais pas Léotard ? s’écria Gig. Il est vrai qu’il ne connaît rien, cet enfant-là. Léotard, mon ami, c’est le premier gymnasiarque des temps modernes et peut-être des anciens. C’est un homme fait au moule qui n’a pas peur de se jeter dans le vide, d’un trapèze à l’autre. Tiens, comme