Aller au contenu

Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t1.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
II
AVERTISSEMENT.

dont les éditions se multiplient rapidement, est le code de la raison et de la liberté. Au début de la révolution il inspire le parti constitutionnel ; Mounier, Clermont-Tonnerre, Lally-Tollendal, Malouet, Mirabeau lui-même, quoiqu’il soit plus près des économistes, sont des disciples de Montesquieu. Mais aussitôt que l’emporte l’école de Rousseau, et surtout celle du baron d’Holbach, dont l’influence n’a pas été assez remarquée, aussitôt qu’on s’adresse à la raison et à la philosophie seules pour inventer une constitution applicable à tous les peuples de la terre, le nom de Montesquieu s’éclipse ; il disparaît avec la liberté. On ne veut plus d’un homme qui compte avec les faits, et qui ne veut pas rompre brusquement avec le passé. Montesquieu n’est plus un sage, un politique, un citoyen ; c’est un homme de robe, gentilhomme et bel esprit. On le relègue dédaigneusement avec les aristocrates et les suppôts de la monarchie.

Il en est tout autrement quand la constitution de l’an III, imitée de la constitution des États-Unis, remet en faveur les idées de modération. Montesquieu revient à la mode ; c’est la grande autorité du jour ; on publie six éditions de ses œuvres en quatre ans. Sous le consulat et sous l’empire l’auteur de l’Esprit des lois rentre dans l’ombre, mais pour en sortir avec éclat en 1814. La Charte lui donne raison ; le régime constitutionnel est tout entier dans le fameux chapitre De la constitution d’An-