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GRANDEUR ET DÉCADENCE

Les maisons étaient placées sans ordre et très petites : car les hommes, toujours au travail ou dans la place publique, ne se tenaient guère dans les maisons.

Mais la grandeur de Rome parut bientôt dans ses édifices publics. Les ouvrages[1] qui ont donné et qui donnent encore aujourd’hui la plus haute idée de sa puissance ont été faits sous les rois. On commençait déjà à bâtir la ville éternelle[2].

Romulus et ses successeurs furent presque toujours en guerre avec leurs voisins pour avoir des citoyens, des femmes ou des terres. Ils revenaient dans la ville avec les dépouilles des peuples vaincus : c’étaient des gerbes de blé et des troupeaux ; cela y causait une grande joie. Voilà l’origine des triomphes, qui furent dans la suite la principale cause des grandeurs où cette ville parvint.

Rome accrut beaucoup ses forces par son union avec les Sabins, peuples durs et belliqueux comme les Lacédémoniens, dont ils étaient descendus[3]. Romulus prit leur bouclier, qui était large, au lieu du petit bouclier argien, dont il s’était servi jusqu’alors[4], et on doit remarquer que ce qui a le plus contribué à rendre les Romains les maîtres du monde, c’est qu’ayant combattu successivement contre

  1. Voyez l’étonnement de Denys d’Halicarnasse sur les égouts faits par Tarquin (Ant. Rom., III). — Il subsiste encore. (M.) Conf. Bossuet, Discours sur l’histoire universelle IIIe partie, chap. VI : « Dès le commencement, les ouvrages publics furent tels, que Rome n’en rougit pas, depuis même qu’elle se vit maitresse du monde, etc. »
  2. Ce paragraphe n’est point dans A.
  3. C’est une erreur prise de Denys d’Halicarnasse.
  4. Plutarque, Vie de Romulus. (M.) — A. rédige ainsi ce paragraphe : « Les forces de Rome s’accrurent beaucoup par son union avec les Sabins, peuple dur et belliqueux comme les Lacédémoniens dont il était descendu. Romulus prit la façon de leur bouclier, qui étoit large, etc. »