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DES ROMAINS, CHAP. II.


comptoit toujours sur lui-même ; il avait naturellement du courage, c’est-à-dire de cette vertu qui est le sentiment de ses propres forces[1].

Leurs troupes étant toujours les mieux disciplinées, il était difficile que, dans le combat le plus malheureux, ils ne se ralliassent[2] quelque part, ou que le désordre ne se mît quelque part chez les ennemis. Aussi les voit-on continuellement, dans les histoires, quoique surmontés dans le commencement par le nombre ou par l’ardeur des ennemis, arracher enfin la victoire de leurs mains.

Leur principale attention était d’examiner en quoi leur ennemi pouvait avoir de la supériorité sur eux, et d’abord ils y mettaient ordre. Ils s’accoutumèrent[3] à voir le sang et les blessures dans les spectacles des gladiateurs, qu’ils prirent des Étrusques[4].

Les épées tranchantes[5] des Gaulois, les éléphants de Pyrrhus, ne les surprirent qu’une fois. Ils suppléèrent à la faiblesse de leur cavalerie[6], d’abord, en ôtant les brides des chevaux, pour que l’impétuosité[7] n’en pût être arrêtée ; ensuite, en y mêlant des vélites[8]. Quand ils eurent

  1. Dans A. cet alinéa est placé plus haut, à la suite de celui qui commence par : Publius Nasica, etc.
  2. A. Quelques Romains ne se ralliassent quelque part, ou que le désordre ne se mit quelque part, etc.
  3. Cette phrase n'est point dans A.
  4. Fragment de Nicolas de Damas, liv. X, tiré d’Athénée, liv. IV, ch. XIII. Avant que les soldats partissent pour l’armée, on leur donnait un combat de gladiateurs. Jules Capitolin, Vie de Maxime et de Balbin, ch. VIII. (M.)
  5. Les Romains présentaient leurs javelots, qui recevaient les coups des épées gauloises, et les émoussaient. (M.)
  6. Elle fut encore meilleure que celle des petits peuples d’Italie. On la formait des principaux citoyens, à qui le public entretenait un cheval. Quand elle mettait pied à terre, il n’y avait point d’infanterie plus redoutable, et très souvent elle déterminait la victoire. (M.)
  7. A. Afin que l’impétuosité etc.
  8. C’étaient de jeunes hommes légèrement armés, et les plus agiles de la légion, qui au moindre signal sautaient sur la croupe des chevaux, ou combattaient à pied. (Valère Maxime, liv. II, ch. III, §.3 ; Tite-Live, liv. XXVI, ch. IV). (M.)