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CHAPITRE VII.


COMMENT MITHRIDATE PUT LEUR RÉSISTER[1].


De tous les rois que les Romains attaquèrent, Mithridate seul se défendit avec courage et les mit en péril.

La situation de ses États était admirable pour leur faire la guerre. Ils touchaient au pays inaccessible du Caucase, rempli de nations féroces dont on pouvait se servir. De là, ils s’étendaient sur la mer du Pont. Mithridate la couvrait de ses vaisseaux et allait continuellement acheter de nouvelles armées de Scythes ; l’Asie était ouverte à ses invasions ; il était riche, parce que ses villes sur le Pont-Euxin faisaient un commerce avantageux avec des nations moins industrieuses qu’elles[2].

Les proscriptions, dont la coutume commença dans ces temps-là, obligèrent plusieurs Romains de quitter leur patrie. Mithridate les reçut à bras ouverts : il forma des légions où il les fit entrer, qui furent ses meilleures troupes[3].

  1. Montesquieu, pour ce chapitre entier, s'est inspiré de Florus, qu'il suit en l'abrégeant. On retrouve, presque à chaque phrase, un souvenir de l'histoire romain. (Aubert.) On peut ajouter qu'il a eu devant les yeux le Mithridate de Racine. Conf. Esprit des lois, XXI, 12.
  2. C'est la vieille erreur antiéconomique que le dommage de l'un et le profit de l'autre. Tout au contraire, c'est entre nations riches et industrieuses que le commerce est le plus avantageux pour toutes deux. Qu'est-ce en effet que le commerce, sinon un échange de richesses ?
  3. Frontin, Stratagèmes, liv. II, chap. III, ex. 15, 27, dit qu’Archélaüs,