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CHAPITRE IV.


DIFFÉRENCE DES EFFETS DE L’ÉDUCATION
CHEZ LES ANCIENS ET PARMI NOUS.


La plupart des peuples anciens vivoient dans des gouvernements qui ont la vertu pour principe ; et, lorsqu’elle y étoit dans sa force, on y faisoit des choses que nous ne voyons plus aujourd’hui, et qui étonnent nos petites âmes.

Leur éducation avoit un autre avantage sur la nôtre ; elle n’étoit jamais démentie. Épaminondas, la dernière année de sa vie, disoit, écoutoit, voyoit, faisoit les mêmes choses que dans l’âge où il avoit commencé d’être instruit.

Aujourd’hui, nous recevons trois éducations différentes ou contraires : celle de nos pères, celle de nos maîtres, celle du monde. Ce qu’on nous dit dans la dernière renverse toutes les idées des premières. Cela vient, en quelque partie, du contraste qu’il y a parmi nous entre les engagements de la religion et ceux du monde ; chose que les anciens ne connoissoient pas [1].

  1. Machiavel Discours sur Tite-Live, liv. I, chap. XII. J.-J. Rousseau (Émile, liv. I) reconnoît aussi trois sortes d’éducation : celle de la nature, celle des hommes, celle des choses. Le développement interne de nos facultés et de nos organes est l'éducation de la nature ; l'usage qu’on nous apprend à faire de ce développement est l’éducation des hommes, et l'acquis de notre propre expérience sur les objets qui nous affectent est l’éducation des choses. (PARRELLE.)
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