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Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t4.djvu/452

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DE L’ESPRIT DES LOIS.


carthaginoises ; et, à la hâte, il les mettoiten sûreté contre les hommes sauvages et les bêtes féroces. Les calamités des Carthaginois firent cesser la navigation d’Afrique ; il fallut bien que ces familles périssent, ou devinssent sauvages. Je dis plus ; quand les ruines de ces villes subsisteroient encore, qui est-ce qui auroitétéen faire la découverte dans les bois et dans les marais ? On trouve pourtant dans Scylax et dans Polybe, que les Carthaginois avoient de grands établissements sur ces côtes. Voilà les vestiges des villes d’Hannon ; il n’y en a point d’autres, parce qu’à peine y en a-t-il d’autres de Carthage même [1].

Les Carthaginois étoient sur le chemin des richesses : et, s’ils avoient été jusqu’au quatrième degré de latitude nord, et au quinzième de longitude, ils auroient découvert la côte d’Or et les côtes voisines. Ils y auroient fait un commerce de toute autre importance que celui qu’on y fait aujourd’hui, que l’Amérique semble avoir avili les richesses de tous les autres pays : ils y auroient trouvé des trésors qui ne pouvoient être enlevés par les Romains.

On a dit des choses bien surprenantes des richesses de l’Espagne. Si l’on en croit Aristote [2], les Phéniciens qui abordèrent à Tartèse [3] y trouvèrent tant d’argent que leurs navires ne pouvoient le contenir, et ils firent faire de ce métal leurs plus vils ustensiles. Les Carthaginois, au rapport de Diodore [4], trouvèrent tant d’or et d’argent dans les Pyrénées, qu’ils en mirent aux ancres de leurs navires.

  1. A. B. Parce qu'il n'y en a poiot d’autres de Carthage même.
  2. Des choses merveilleuses. (M.)
  3. A. B. Tartesse.
  4. Liv. VI. (M.) L’auteur cite le sixième livre de Diodore, et ce sixième livre n'existe pas. Diodore au cinquième parle des Phéniciens et non pas des Carthaginois. (VOLTAIRE.)