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DÉFENSE


RÉPONSE.


Et cette réponse est très-aisée. Ils l’ont appris dans la révélation, s’ils ont été assez heureux pour cela ; ou bien dans cette loi qui, en imprimant en nous l’idée du créateur, nous porte vers lui. L’auteur de l'Esprit des Lois a-t-il dit comme Virgile : César partage l'empire avec Jupiter [1] ? Dieu, qui gouverne l’univers, n’a-t-il pas donné à de certains hommes plus de lumières, à d’autres plus de puissance ? Vous direz que l’auteur a dit que, parce que Dieu a voulu que des hommes gouvernassent des hommes, il n’a plus voulu qu’ils lui obéissent, et qu’il s’est démis de l’empire qu’il avoit sur eux, etc. Voilà où sont réduits ceux qui, ayant beaucoup de foiblesse pour raisonner, ont beaucoup de force pour déclamer.


NEUVIÈME OBJECTION.


Le critique continue : « Remarquons encore que l’auteur, qui trouve que Dieu ne peut gouverner les êtres libres aussi bien que les autres, parce qu’étant libres, il faut qu’ils agissent par eux-mêmes (je remarquerai, en passant, que l’auteur ne se sert point de cette expression, « que Dieu ne peut pas »), ne remédie à ce désordre que par des lois, qui peuvent bien montrer à l’homme ce qu’il doit faire, mais qui ne lui donnent pas de le faire : ainsi, dans le système de l’auteur, Dieu crée des êtres, dont il ne peut empêcher le désordre, ni le réparer... Aveugle, qui ne voit pas que Dieu fait ce qu’il veut, de ceux mêmes qui ne font pas ce qu’il veut !

  1. Divisum Imperium cum Jove Cœsar habet.