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DE L’ESPRIT DES LOIS.


voir combattu ainsi l'erreur de Bayle ? On prend le chapitre [1] suivant, qui n’a rien à faire avec Bayle : « Les lois humaines, y est-il dit, faites pour parler à l’esprit, doivent donner des préceptes, et point de conseils ; la religion, faite pour parler au cœur, doit donner beaucoup de conseils et peu de préceptes. » Et de là on conclut que l'auteur regarde tous les préceptes de l’Évangile comme des conseils. Il pourroit dire aussi que celui qui fait cette critique regarde lui-même tous les conseils de l’Évangile comme des préceptes ; mais ce n’est pas sa manière de raisonner, et encore moins sa manière d’agir. Allons au fait : il faut un peu allonger ce que l’auteur a raccourci. M. Bayle avoit soutenu qu’une société de chrétiens ne pourroit pas subsister ; et il alléguoit pour cela l’ordre de l’Évangile de présenter l’autre joue quand on reçoit un soufflet, de quitter le monde, de se retirer dans les déserts, etc. L’auteur a dit que Bayle prenoit pour des préceptes ce qui n’étoit que des conseils, pour des règles générales ce qui n’étoit que des règles particulières : en cela l’auteur a défendu la religion. Qu’arrive-t-il ? On pose, pour premier article de sa croyance, que tous les livres de l’Évangile ne contiennent que des conseils.


DE LA POLYGAMIE.


D’autres articles ont encore fourni des sujets commodes pour les déclamations. La polygamie en étoit un excellent. L’auteur en a fait un chapitre exprès, où il l’a réprouvée : le voici :

  1. C’est le ch. VII du liv. XXIV.