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Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t6.djvu/25

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LIVRE XXXI, CHAP. II.


attribuée à Clotaire I. Elle est de Clotaire II. J’en donnerai trois raisons :

1° Il y est dit que le roi conservera les immunités accordées aux églises par son père et son aïeul [1]. Quelles immunités auroit pu accorder aux églises Childéric, aïeul de Clotaire Ier, lui qui n’étoit pas chrétien, et qui vivoit avant que la monarchie eût été fondée ? Mais si Ton attribue ce décret à Clotaire II, on lui trouvera pour aïeul Clotaire Ier lui-même, qui fit des dons immenses aux églises pour expier la mort de son fils Cramne, qu’il avoit fait brûler avec sa femme et ses enfants.

2° Les abus que cette constitution corrige, subsistèrent après la mort de Clotaire Ier , et furent même portés à leur comble pendant la foi blesse du règne de Gontran, la cruauté de celui de Chilpéric, et les détestables régences de Frédégonde et de Brunehault. Or, comment la nation auroit-elle pu souffrir des griefs si solennellement proscrits, sans s’être jamais récriée sur le retour continuel de ces griefs ? Comment n’auroit-elle pas fait pour lors ce qu’elle fit lorsque Chilpéric II [2] ayant repris les anciennes violences, elle le pressa d’ordonner que, dans les jugements, on suivit la loi et les coutumes, comme on faisoit anciennement [3] ?

3° Enfin, cette constitution, faite pour redresser les griefs, ne peut point concerner Clotaire Ier ; puisqu’il n’y avoit point sous son règne de plaintes dans le royaume à

  1. J’ai parlé an livre précédent, chap. XXI, de ces immunités, qui étoient des concessions de droits de justice, et qui contenoient des défenses aux juges royaux de faire aucune fonction dans le territoire, et étoient équivalentes à l’érection ou concession d’un fief. (M.)
  2. Il commença à régner vers l’an 670. (M.)
  3. Voyez la Vie de saint Léger (M.)