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LIVRE XXXI, CHAP. X.


peine y a voit-il des ecclésiastiques pour les redemander. Il resta donc encore à la piété de la troisième race assez de fondations à faire et de terres à donner : les opinions répandues et crues dans ces temps-là auroient privé les laïques de tout leur bien, s’ils avoient été assez honnêtes gens. Mais si les ecclésiastiques avoient de l’ambition, les laïques en avoient aussi : si le mourant donnoit, le successeur vouloit reprendre. On ne voit que querelles entre les seigneurs et les évêques, les gentilshommes et les abbés ; et il falloit qu’on pressât vivement les ecclésiastiques, puisqu’ils furent obligés de se mettre sous la protection de certains seigneurs, qui les défendoient pour un moment, et les opprimoient après.

Déjà une meilleure police, qui s’établissoit dans le cours de la troisième race, permettoit aux ecclésiastiques d’augmenter leur bien. Les calvinistes parurent, et firent battre de la monnoie de tout ce qui se trouva d’or et d’argent dans les églises. Comment le clergé auroit-il été assuré de sa fortune ? il ne l’étoit pas de son existence. Il traitoit des matières de controverse, et l’on brûloit ses archives. Que servit-il de redemander à une noblesse toujours ruinée ce qu’elle n’avoit plus, ou ce qu’elle avoit hypothéqué de mille manières ? Le clergé a toujours acquis, il a toujours rendu, et il acquiert encore.


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