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LIVRE XXXI, CHAP. XVI.


soit à celui qui joignoit à la royauté une grande puissance. Pour lors, l’autorité du maire fut jointe à l’autorité royale. Dans le mélange de ces deux autorités, il se fit une espèce de conciliation. Le maire avoit été électif, et le roi héréditaire : la couronne, au commencement de la seconde race, fut élective, parce que le peuple choisit ; elle fut héréditaire, parce qu’il choisit toujours dans la même famille [1].

Le père le Cointe [2] , malgré la foi de tous les monuments [3], nie [4] que le pape ait autorisé ce grand changement : une de ses raisons est qu’il auroit fait une injustice. Et il est admirable de voir un historien juger de ce que les hommes ont fait, par ce qu’ils auroient dû faire ! Avec cette manière de raisonner, il n’y auroit plus d’histoire.

Quoi qu’il en soit, il est certain que, dès le moment de la victoire du duc Pépin, sa famille fut régnante, et que celle des Mérovingiens ne le fut plus. Quand son petit-fils Pépin fut couronné roi, ce ne fut qu’une cérémonie de plus, et un fantôme de moins : il n’acquit rien par là que les ornements royaux ; il n’y eut rien de changé dans la nation.

J’ai dit ceci pour fixer le moment de la révolution, afin qu’on ne se trompe pas, en regardant comme une

  1. . Voyez le testament de Charlemagne ; et le partage que Louis le Débonnaire fit à ses enfants dans l’assemblée des États, tenue à Quierzy, rapportée par Goldast : Quem populus eligere velit, ut patri suo succedat in regni hœreditate. (M.)
  2. Auteur des Annales ecclesiastici Francorum, de l’an 417 à l’an 845, Paris, 1665-1683, 8 vol. in-f°.
  3. L’anonyme, sur l’an 752 ; et Chron. Centul. sur l’an 754. (M.)
  4. Fabella quœ post Pippini mortem excogitatu est, œquitati ac sanctitati Zachariœ papœ plurimum adversatur..... Annales ecclesiastici Francorum, tome II, p. 319. (M.)