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LIVRE XXXI, CHAP. XXIII.


obligés de céder à inopportunité des demandes, et qu’on leur arracha souvent ce qu’ils n’auroient pas voulu donner : on y voit que le clergé se croyoit plus opprimé par la noblesse que par les rois. Il paroît encore que Charles le Chauve [1] fut celui qui attaqua le plus le patrimoine du clergé, soit qu’il fût le plus irrité contre lui, parce qu’il avoit dégradé son père à son occasion, soit qu’il fût le plus timide. Quoi qu’il en soit, on voit dans les Capitulaires [2] des querelles continuelles entre le clergé qui demandoit ses biens, et la noblesse qui refusoit, qui éludoit, ou qui différoit de les rendre ; et les rois entre deux.

C’est un spectacle digne de pitié, de voir l’état des choses en ces temps-là. Pendant que Louis le Débonnaire faisoit aux églises des dons immenses de ses domaines, ses enfants distribuoient les biens du clergé aux laïques. Souvent la même main qui fondoit des abbayes nouvelles, dépouilloit les anciennes. Le clergé n’avoit point un état

    même année, art. 3, 4 et ; et le capitulaire in villa Sparnaco, de l'an 846, art. 20 ; et la lettre que les évêques assemblés à Reims écrivirent, l'an 858, à Louis le Germanique, art. 8. (M.)

  1. Voyez le capitulaire in villa Sparnaco, de l’an 846. La noblesse avoit irrité le roi contre les évêques, de sorte qu’il les chassa de l’assemblée : on choisit quelques canons des synodes, et on leur déclara que ce seroient les seuls qu’on observeroit ; on ne leur accorda que ce qu’il étoit impossible de leur refuser. Voyez les art. 20, 21 et 22. Voyez aussi la lettre que les évêques assemblés écrivirent l'an 858 à Louis le Germanique, art. 8 ; et l'édit de Pistes, de 864, art. 5. (M.)
  2. Voyez le même capit. de l’an 846, in villa Sparnaco. Voyez aussi le capitul. de l’assemblée tenue apud Marsnam, de l'an 847, art. 4, dans laquelle le clergé se retrancha à demander qu’on le remit on possession de tout ce dont il avoit joui sous le règne de Louis le Débonnaire. Voyez aussi le capitul. de l’an 851, apud Marsnam, art. 6 et 7, qui maintient la noblesse et le clergé dans leurs possessions ; et celui apud Bonoilum, de l’an 856, qui est une remontrance des évêques au roi, sur ce que les maux, après tant de lois faites, n’avoient pas été réparés ; et enfin la lettre que les évêques assemblés à Reims écrivirent, l’an 858, à Louis le Germanique, art. 8. (M.)