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CHAPITRE XXIX.


DE LA NATURE DES FIEFS DEPUIS LE RÈGNE
DE CHARLES LE CHAUVE.


J’ai dit que Charles le Chauve voulut que, quand le possesseur d’un grand office ou d’un fief laisseroit en mourant un fils, l’office ou le fief lui fût donne. Il seroit difficile de suivre le progrès des abus qui en résultèrent, et de l’extension qu’on donna à cette loi dans chaque pays. Je trouve dans les Livres des Fiefs [1] qu’au commencement du règne de l’empereur Conrad II, les fiefs, dans les pays de sa domination, ne passoient point aux petits-fils ; ils passoient seulement à celui des enfants du dernier possesseur que le seigneur avoit choisi [2] : ainsi les fiefs furent donnés par une espèce d’élection que le seigneur fit entre ses enfants.

J’ai expliqué, au chapitre XVII de ce livre, comment, dans la seconde race, la couronne se trouvoit à certains égards élective, et à certains égards héréditaire. Elle étoit héréditaire, parce qu’on prenoit toujours les rois dans cette race ; elle l’étoit encore, parce que les enfants succédoient ; elle étoit élective, parce que le peuple choisissoit entre

  1. Liv. I, tit. I. (M.)
  2. Sic progressum est, ut ad filios deveniret in quem dominus hoc vellet beneficium confirmare. Ibid. (M.)