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LETTRES FAMILIÈRES.

serois bien aise d’être employé dans les cours étrangères, et que j’avois beaucoup travaillé pour m’en rendre capable. Vous me feriez bien plaisir de voir là-dessus M. Chauvelin, de tâcher de pénétrer dans quels sentiments il est à mon égard. Je n’ai jamais eu occasion de le connoître pendant qu’il a été particulier, et, depuis, je n’ai pas voulu lui donner assez mauvaise opinion de moi, pour qu’il pût croire que je cherchois la fortune. Cependant je voudrois savoir si je suis un sujet agréable, ou si je dois m’ôter cette idée de la tête, ce qui sera bientôt fait. Les raisons pour qu’on jette les yeux sur moi sont que je ne suis pas plus bête qu’un autre ; que j’ai ma fortune faite, et que je travaille pour l’honneur et non pas pour vivre ; que je suis assez sociable et assez curieux pour être instruit dans quelque pays que j’aille. Adieu, mon cher abbé, je suis plus à vous qu’à moi-même[1].


Montesquieu.
À Vienne, ce 10 mai 1728.

Je crois que ceci doit être secret.


_______


LETTRE X.[2]


[A MYLORD WALDEGRAVE][3].


Celle-ci est, Mylord, pour vous remercier de toutes les

  1. Vauvenargues, lui aussi, demanda à être employé dans la diplomatie et n’eut pas plus de succès que Montesquieu. Il semble, cependant, qu’aucun des deux n’eût déshonore le métier.
  2. Collection Alf. Sensier.
  3. James, comte de Waldegrave, petit-fils par sa mère, de Jacques II et