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LETTRES FAMILIÈRES.


seroit sa première lettre à notre nouvel associé ; et je pense que vous trouverez que cela est dans les règles. Je vois que notre académie se change en société de francs-maçons, excepté qu’on n’y boit ni qu’on ni chante : mais on y bâtit, et M. de Tourny est notre roi Hiram qui nous fournira les ouvriers ; mais je doute qu’il nous fournisse les cèdres.

Je crois que le prince de Craon est actuellement à Vienne ; mais il va arriver en Lorraine ; et si vous m’envoyez votre lettre, je la lui ferait tenir. Il faut bien que je vous donne des nouvelles d’Italie sur l'Esprit des Lois. M. le duc de Nivernois en écrivit il y a trois semaines à M. de Forcalquier, d’une manière que je ne saurois vous répéter sans rougir. Il y a deux jours qu’il en reçut une autre, dans laquelle il mande que, dès qu’il parut à Turin, le roi de Sardaigne le lut. Il ne m’est pas non plus permis de répéter ce qu’il en dit : je vous dirai seulement le fait ; c’est qu’il le donna pour le lire à son fils le duc de Savoie, qui l’a lu deux fois : le marquis de Breil me mande qu’il lui a dit qu’il vouloit le lire toute sa vie. Il y a bien de la fatuité à moi de vous mander ceci ; mais comme c’est un fait public, il vaut autant que je le dise qu’un autre ; et vous concevez bien que je dois aveuglément approuver le jugement des princes d’Italie. Le marquis de Breil me mande que S. A. R. le duc de Savoie a un génie prodigieux, une conception et un bon sens admirables.

Huart, libraire, voudroit fort avoir la traduction en vers latins du docteur Clansy [1] du commencement du

    lage à son retour à Paris ; et il alloit quelquefois en favoriser M. de Montesquieu : ce qui l’ennuyoit beaucoup, et lui faisoit perdre des heures précieuses. (G )

  1. Savant Anglais, entièrement aveugle, excellent poëte latin, qui, pen-