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LETTRES FAMILIÈRES.


y a deux ou trois jours, une lettre assez originale : elle est d’un bourgeois de Paris qui me doit de l’argent, et qui me prie de l’attendre jusqu’au retour du parlement ; et je lui mande qu’il feroit bien de prendre un terme un peu plus fixe. C’est un grand fléau que cette petite vérole : c’est une nouvelle mort à ajouter à celle à laquelle nous sommes tous destinés. Les peintures riantes qu’Homère lait de ceux qui meurent, de cette fleur qui tombe sous la faulx du moissonneur, ou qui est cueillie par les doigts d’une bergère, ne peuvent pas s’appliquer à cette mort-là.

J’aurois eu l’honneur devons envoyer les chapitres que vous voulez bien me demander, si vous ne m’aviez appris que vous n’étiez plus dans le lieu où vous voulez lés faire voir. Mais je vous les apporterai : et vous les corrigerez, et vous me direz : « Je n’aime pas cela. » Et vous ajouterez : « Il falloit dire ainsi. » Je vous prie, madame, d’avoir la bonté d’agréer les sentiments du monde les plus respectueux.


MONTESQUIEU.


De la Brède, le 3 décembre 1753.


Vous voulez, madame, que vos lettres partent sans enveloppe.


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LETTRE CXXXVIII.


A L’ABBÉ DE GUASCO.


J’arrivai avant-hier au soir de Bordeaux : je n’ai encore vu personne, et je suis plus pressé de vous écrire que de voir qui que ce soit. Je verrai Huart [1] ; et s’il n’a pas rempli

  1. Imprimeur de ses ouvrages à Paris. (G.)