Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t7.djvu/478

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
460
VOYAGE


L’imagination la plus vive et le goût le plus galant n’approcheront jamais de l’agréable assemblage qui compose ces jardins. Le Dieu qui les protège y fixa son séjour, et tout s’y ressent de sa favorable influence.

L’art n’y parait que pour faire goûter avec plus d’admiration les beautés de la nature, ou pour mieux dire, on n’y reconnaît point d’art. Paphos enfin plaît aux Amours, et Vénus ne l’a jamais quitté sans regret, que pour aller à la conquête d’Adonis [1].

Rempli de votre idée, que ne sentis-je pas à Paphos [2] ? Tâchez de le comprendre, Mélite, car je ne l’exprimerais jamais.

J’errai quelques moments de bosquet en bosquet, et j’écoutais avec attention [3] les sons touchants de Philomèle, qui me paraissaient plus tendres en se mêlant au murmure des fontaines de cette île, quand j’aperçus une nymphe qui venait à moi.

Je ne doute pas, heureux Amant, dit-elle en m’abordant, que vous ne soyez bien reçu dans cette cour. Je suis Diphile, ai-je répondu [4], j’aime Mélite. L’amant de Mélite, repart la nymphe, doit être le modèle des amants ? Nous entendons sans cesse parler des charmes de Mélite à la cour de Vénus, et vous venez sans doute rendre grâces à la déesse de ses bienfaits ; mais on n’entre point encore dans son palais. Je vous y conduirai quand il en sera

  1. A. Dit simplement : Paphos enfin plaît à Vénus.
  2. A. Toujours présente à mon idée, que ne sentis-je pas à Paphos ? Tâchez de le comprendre, Melite ; je ne l’exprimerai jamais !

    Notre âme est une partie
    Qui toujours cherche à s’unir ;
    Est-elle une fois réunie,
    Elle jouit des vrais plaisirs.

  3. A. Avec soin.
  4. A. Lui répondis-je.