Nous nous assîmes près d’un ruisseau qui se plaît à embellir son gazon, pour attirer les Nymphes sur ses bords, et dès que Zélide commença à parler, il adoucit son murmure pour écouter ce qu’elle raconta ainsi :
Vous devez tous vos feux au Dieu de Cythère, et je crois Diphile, qu’il n’enflamma jamais plus heureusement : mais entre Lycas et moi, nous rassemblons les feux de Bacchus et de l’Amour. Ces Dieux dont je vous ai fait connaître l’aimable intelligence, sont sujets aux faiblesses que peuvent avoir les autres Dieux.
Quand il s’agit de soutenir ses droits, la plus forte amitié n’est pas exempte de froideur. Un berger des rives du Lignon, cueillait un jour un raisin pour l’offrir à sa bergère. Un buveur jaloux de la gloire de Bacchus, rencontre le berger qui entrelaçait ce raisin dans des guirlandes de fleurs.
Si vous cherchez à plaire à l’Amour, en offrant des présents à vos bergères, dit le buveur, contentez-vous des dons de Flore et de Pomone, et laissez aux buveurs les dons de Bacchus. Il n’est rien de réservé pour plaire à l’Amour, répondit le berger, et Bacchus lui-même ne pourrait m’empêcher d’offrir ce présent à Lisis. Téméraire, repartit le buveur, tu ne connais pas Bacchus, mais tu connaîtras sa vengeance.
L’Amour protégeait le berger, et Bacchus se déclara contre lui. Vénus craignant que l’intérêt particulier de ces deux Dieux ne nuisît à son empire, ne perdit point de temps pour rétablir leur intelligence.
Elle leur fit jurer par le Styx d’oublier cette querelle ; je veux, leur dit-elle, pour que l’univers ne doute pas de votre union, que Bacchus porte aujourd’hui les armes de mon fils, et que mon fils règne sur l’empire de Bacchus.