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ACADÉMIQUES.

qu’il espère de nous. Si notre conduite est condamnée, si elle est soupçonnée, nous devenons soumis à une espèce de récusation publique ; et le droit de juger, que nous exerçons, est mis, par ceux qui sont obligés de le souffrir, au rang de leurs calamités.

Il est temps, messieurs, de vous parler de ce jeune prince, héritier de la justice de ses ancêtres comme de leur couronne. L’histoire ne connoît point de roi qui, dans l’âge mûr et dans la force de son gouvernement, ait eu des jours si précieux à l’Europe, que ceux de l’enfance de ce monarque. Le ciel avoit attaché au cours de sa vie innocente de si grandes destinées, qu’il sembloit être le pupille et le roi de toutes les nations. Les hommes des climats les plus reculés regardoient ses jours comme leurs propres jours. Dans les jalousies des intérêts divers, tous les peuples vivoient dans une crainte commune. Nous, ses fidèles sujets, nous François, à qui on donne l’éloge d’aimer uniquement notre roi, à peine avions-nous en ce point l’avantage sur les nations alliées, sur les nations rivales, sur les nations ennemies. Un tel présent du ciel, si grand par ce qui s’est passé, si grand dans le temps présent, nous est encore pour l’avenir une illustre promesse. Né pour la félicité du genre humain, n’y auroit-il que ses sujets qu’il ne rendroit pas heureux ? Il ne sera point comme le soleil, qui donne la vie à tout ce qui est loin de lui, et qui brûle tout ce qui l’approche.

Nous venons de voir une grande princesse[1] sortir du deuil dont elle étoit environnée. Elle a paru, et les peuples divers, dans ces sortes d’événements, uniquement attentifs

  1. Marie Leczinska. Ce discours fut prononce dans le temps du mariage du roi.