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SUR LA CONSIDÉRATION.

geste, chaque parole de ceux qui nous connoissent sont autant de nouveaux témoignages qui en retracent les douceurs, et perpétuent les récompenses de notre vertu.

« Si ces réflexions sont solides, ajoute cet illustre académicien, il faut donc convenir que la plus grande partie des hommes devroit renoncer à ce qu’on appelle Réputation, qu’ils devroient se borner à mériter l’estime particulière de ceux avec qui ils doivent vivre, et que, se renfermant dans la sphère où la Providence les a placés, ils devroient se contenter de la considération de ceux qui la composent avec eux ; mais l’ambition de l’homme est trop grande, son orgueil trop impatient pour s’accommoder d’un sentiment si raisonnable. Heureux, dit M. de Caupos en finissant, celui qui, semblable à l’auteur des Réflexions que vous venez de lire. Monsieur, possède non-seulement la considération distinguée qui est due à la personne et à la place, mais qui peut encore par les heureux talents de son esprit, se promettre la durée d’une réputation éclatante, dont il a déjà commencé de jouir dans les premières années de sa vie[1]. »

Je suis, Monsieur, etc.
A Bordeaux, le 21 septembre 1725.
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  1. On trouve dans les écrits de Mme la marquise de Lambert un Discours sur ta différence qu’il y a de la Considération à la Réputation qui est un souvenir et une imitation des Réflexions de Montesquieu. Des phrases entières ont été conservées par ce plagiat innocent (car rien ne prouve que l’écrit de Mme de Lambert fût destiné à la publicité). Voyez à ce sujet l’intéressante lecture que M. Cougny a faite à la Société des Sciences morales, Lettres et Arts de Seine-et-Oise. (Mémoires de la Société, tome XI, année 1877.)