Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 1.djvu/144

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Athenes que ceux qui n’auroient pas deux mille drachmes seroient exclus du droit de suffrage, il forma la meilleure aristocratie qui fût possible ; parce que ce cens, étoit si petit, qu’il n’excluoit que peu de gens, & personne qui eût quelque considération dans la cité.

Les familles aristocratiques doivent donc être peuple, autant qu’il est possible. Plus une aristocratie approchera de la démocratie, plus elle sera parfaite ; & elle le deviendra moins à mesure qu’elle approchera de la monarchie.

La plus imparfaite de toutes est celle où la partie du peuple qui obéit est dans l’esclavage civil de celle qui commande, comme l’aristocratie de Pologne, où les paysans sont esclaves de la noblesse.


CHAPITRE IV.

Des loix, dans leur rapport avec la nature du gouvernement monarchique.


LES pouvoirs intermédiaires, subordonnés & dépendans, constituent la nature du gouvernement monarchique, c’est-à-dire, de celui où un seul gouverne par des loix fondamentales. J’ai dit les pouvoirs intermédiaires, subordonnés & dépendans : en effet, dans la monarchie, le prince est la source de tout pouvoir politique & civil. Ces loix fondamentales supposent nécessairement des canaux moyens par où coule la puissance : car, s’il n’y a dans l’état que la volonté momentanée & capricieuse d’un seul, rien ne peut être fixe, & par conséquent aucune loi fondamentale.

Le pouvoir intermédiaire subordonné le plus naturel, est celui de la noblesse. Elle entre, en quelque façon, dans l’essence de la monarchie, dont la maxime fondamentale est, Point de monarque, point de noblesse ; point de noblesse, point de monarque ; mais on a un despote.

Il y a des gens qui avoient imaginé, dans quelques états en Europe, d’abolir toutes les justices des seigneurs.