Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 1.djvu/429

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un esclave de fuir, lui qui n’est point dans la société, & que par conséquent aucunes loix civiles ne concernent ? Il ne peut être retenu que par une loi de famille ; c’est-à-dire, par la loi du maître.


CHAPITRE III.

Autre origine du droit de l’esclavage.


J’AIMEROIS autant dire que le droit de l’esclavage vient du mépris qu’une nation conçoit pour une autre, fondé sur la différence des coutumes.

Lopès de Gama[1] dit, "que les Espagnols trouverent, près de sainte Marthe, des paniers où les habitans avoient des denrées ; c’étoient des cancres, des limaçons, des cigales, des sauterelles. Les vainqueurs en firent un crime aux vaincus." L’auteur avoue que c’est là-dessus qu’on fonda le droit qui rendoit les Américains esclaves des Espagnols ; outre qu’ils fumoient du tabac, & qu’ils ne se faisoient pas la barbe à l’Espagnole.

Les connoissances rendent les hommes doux ; la raison porte à l’humanité : il n’y a que les préjugés qui y fassent renoncer.


CHAPITRE IV.

Autre origine du droit de l’esclavage.


J’AIMEROIS autant dire que la religion donne à ceux qui la professent un droit de réduire en servitude ceux qui ne la professent pas, pour travailler plus aisément à sa propagation.

  1. Biblioth. Angl. tome XIII, deuxieme partie, art. 3.