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CHAPITRE XXVIII.

De l’adoption, chez les Germains.


COMME, chez les Germains, on devenoit majeur en recevant les armes ; on étoit adopté par le même signe. Ainsi Gontran voulant déclarer majeur son neveu Childebert, & de plus l’adopter, il lui dit : "J’ai mis[1] ce javelot dans tes mains, comme un signe que je t’ai donné mon royaume." Et se tournant vers l’assemblée : "Vous voyez que mon fils Childebert est devenu un homme ; obéissez-lui." Théodoric, roi des Ostrogoths, voulant adopter le roi des Hérules, lui écrivit[2] : "C’est une belle chose, parmi nous, de pouvoir être adopté par les armes : car les hommes courageux sont les seuls qui méritent de devenir nos enfans. Il y a une telle force dans cet acte, que celui qui en est l’objet aimera toujours mieux mourir, que de souffrir quelque chose de honteux. Ainsi, par la coutume des nations, & parce que vous êtes un homme, nous vous adoptons par ces boucliers, ces épées, ces chevaux que nous vous envoyons."


CHAPITRE XXIX.

Esprit sanguinaire des rois Francs.


Clovis n’avoit pas été le seul des princes, chez les Francs, qui eût entrepris des expéditions dans les Gaules ; plusieurs de les parens y avoient mené des tribus particulieres : &, comme il y eut de plus grands

  1. Voyez Grégoire de Tours, liv. VII, chap. XXIII.
  2. Dans Cassiodore, liv. IV, lett. 2.