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Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 1.djvu/574

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nes de montagnes. Il fallut donc découvrir la mer Rouge une seconde fois, & l’océan une seconde fois ; & cette découverte appartint à la curiosité des rois Grecs.

On remonta le Nil ; on fit la chasse des éléphans dans les pays qui sont entre le Nil & la mer ; on découvrit les bords de cette mer par les terres : &, comme cette découverte se fit sous les Grecs, les noms en sont grecs, & les temples sont consacrés[1] à des divinités Grecques.

Les Grecs d’Égypte purent faire un commerce très-étendu : ils étoient maîtres des ports de la mer Rouge ; Tyr, rivale de toute nation commerçante, n’étoit plus ; ils n’étoient point gênés par les anciennes[2] superstitions du pays ; l’Égypte étoit devenue le centre de l’univers.

Les rois de Syrie laisserent à ceux d’Égypte le commerce méridional des Indes, & ne s’attacherent qu’à ce commerce septentrional qui se faisoit par l’Oxus & la mer Caspienne. On croyoit dans ces temps-là, que cette mer étoit une partie de l’océan septentrional[3] : & Alexandre, quelque temps avant sa mort, avoit fait construire[4] une flotte, pour découvrir si elle communiquoit à l’océan par le Pont-Euxin, ou par quelqu’autre mer orientale vers les Indes. Après lui, Séleucus & Antiochus eurent une attention particuliere à la reconnoître : ils y entretinrent des flottes[5]. Ce que Séleucus reconnut fut appellé mer Séleucide : ce qu’Antiochus découvrit fut appellé mer Antiochide. Attentifs aux projets qu’ils pouvoient avoir de ce côté-là, ils négligerent les mers du midi ; soit que les Ptolomée, par leurs flottes sur la mer Rouge, s’en fussent déja procuré l’empire ; soit qu’ils eussent découvert dans les Perses un éloignement invincible pour la marine. La côte

du

  1. Ibid.
  2. Elles leur donnoient de l’horreur pour les étrangers.
  3. Pline, liv. II, ch. LXVIII ; & livre VI, chap. IX & XII ; Strabon, livre XI ; Arrien, de l’expédition d’Alexandre ; livre III, page 74 ; & livre V, page 104.
  4. Arrien, de l’expédition d’Alexandre, liv. VII.
  5. Pline, liv. II, ch. LXIV.